Il eût fallu vivre dans leur ombre
repliée dans un coin
de leurs paupières
froissées
Je parle des hommes
qui empêchent les femmes
et de femmes aussi
qui en empêchent d'autres
Je suis une femme solaire
qui n’en a pas l’air
Je n’ espère pas la lune
J’écris des mots
comme d’autres alignent des perles
ou affûtent des couteaux
J’ai fait le tour du jardin
y ai vu mille et mille Lilliputiens
en danger
J’ai écouté Robert et Jeanne
recherché ces poètes
qui n ‘ avaient pas disparu
J’ai fait de petites choses
dans un petit appartement
avec ce corps démusclé
J’ai fait de petit exercices
avec de petites haltères
un petit ballon
plus tellement rond
un manche à balai
un petit vélo
et tous ces exercices de cheville
Le jeu d'écriture fait briller mes yeux
C’est que je sais rarement
où ça va me mener
Pour tout vous dire
même nulle-part
est jouissif
Nulle-part peut être un ailleurs
merveilleux
et sans vos drogues de foutaise
J’écris d’abord pour moi
pour moi seule
J’écris comme je jardine
en mêlant tout
en étalant partout
comme d'autres éclabousseraient les murs
de peinture
Pour me défendre
et pour me consoler
J’aimerais peut-être que ça explose
que mon volcan interne se réveille
que je devienne un arbre
un écureuil
J’aimerais reprendre de longues marches
sans boîter
J’ai été si pressée
si pressée de toutes les manières
J’ai pris le temps de me poser
de me reposer
puis cette triple entorse
ces vacances gâchées
Oiseau fragile
posé
sur une branche de sureau
ou d’acacia
ou d’aubépine
que vos intrigues n'effraient pas
Quels seraient les mots les plus jolis
Ma seule vanité serait d’arriver à écrire des poèmes
sans règles ni gomme
en pomme
Des trucs qui donneraient de l’émotion
pas des machins surfaits
copiés
imités
Bien sûr que des poètes m’inspirent
parfois par le nez
ou avec une petite hache
invisible
Quand à ceux qui voient Dieu partout
Dieu et la vie
c’est comme on veut
Moi c’est la vie
J’avais ce rêve
danser exactement comme les Blues Brother
Ça m’a passé
Chacun fait les rêves qu’il veut
On en a d’autres
Nous "les pauvres"
Mais sois sûre que ta fortune
on s’en tape le coquillard
sauf mal acquise
Il faudrait bien confondre
tous les dictateurs
les dictatrices
les faussaires
les faussaires de rêves
en fréquence
J'aimerais peut-être que ça explose
pas l'anarchie
les comédies
pas le théâtre
les hoax
les arnaques
la charité
J'aimerais m'écouler
calmement
en laves incandescentes
sans faire de victimes
Régénérer les sols
Agir pour le climat
contre la mortification
le désespoir
les mensonges
C'est vrai
Je ne suis rien
Rien de plus qu'un être humain
Ce rien qui me compose
reste important
à mes yeux
J'aimerais que de ma bouche
en sortent des fleurs
du caramel
de très grands baisers
qui n'iraient pas
jusqu'à lécher vos pieds
C'est peut-être l'époque qui ne s'y prête pas
et ma vie sordide d'assistée
involontaire
Remue-toi
Justement
n'ai fait que ça
et tout ça pourquoi
Ils m' ont fait perdre mon temps
mon argent
et un peu de ce corps
déjà malmené