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L'écriture enfouie, c'était déjà avant l'effroi de l'assassinat formulé, avant le dépeçage imaginé, mon corps démembré par une hache, avant le film de ma vie à la vitesse de la lumière, avant la vision de mon propre enterrement , c'était dans le dépeçage de la famille et de son histoire ou plutôt dans son emmêlement, ses imbrications, ses difficultés, c'était dans ses ignorances, ses peurs, ses silences ou ses cris. C'était toute petite déjà, cet amour fou pour le livre, les mots, les signes , pour le rêve et l'inventé, l'imaginaire.

 

C'était dans l'absence et les terreurs enfantines, quand le silence et la nuit vous enveloppent comme un linceul, quand vous mordez votre poing pour ne pas crier.

 

C'était dans la peur de l'abandon quand vous ne marchez pas encore et que votre mère vous pose là, devant le précipice, devant la chose dangereuse et recule en souriant. Elle recule et vous abandonne seule et terrorisée alors que vous ne savez rien et que vous savez dépendre d'elle et que vous n'avez pas compris la photo.

 

Clic-clac !

Clic-Claques !

 

Vous ne souriez-pas non mais pleurez et mordez votre poing, sûre de son désamour et vous détestez cette photo prise et non comprise que vous avez devant les yeux durant toute votre enfance , accrochée au mur du salon et vous, vous n'avez qu'une photo en tête, celle de la mère qui recule et sourit. Photo détestée que votre mère vous a donnée, que vous ne vous décidez-pas à jeter et qui gît retournée au fond d'une maie bourguignonne comme un maléfice indestructible.

 

Nous avons tous connu ça, des terreurs enfantines. Pourquoi les uns les oublient plus que les autres ? Pourquoi les uns s'en sortent-ils mieux que les autres ? Pourquoi les uns ont-ils besoin de disséquer leur passé pour grandir, pour tenter de percer quelques mystères qui leur auraient échappés, qui les auraient empêchés ? Toutes ces questions ne seraient-elles qu'invraisemblables et mortifères ?

 

Ai-je trop senti cet amour immense et non -dit du père et sa destruction alcoolique, cet épuisement physique de la mère ? Ce délabrement du père et la dépression de la mère qui nous soutenait qu'elle avait dans le cerveau quelque-chose qui ne tournait pas rond ?

 

Que va- t' on faire de toi me répétait-elle ?

 

La pauvre fait ce qu'elle peut disaient et s'écrivaient ses propres parents.


Ma mère qui savait tout et savait si peu hormis ses leçons de catéchèse trop bien apprises.

 

Je jette mes peurs dans le néant de mes soucis, cette peur de tuer l'autre en écrivant.

 

Je jette mes peurs sur un concerto de piano de Mozart, refrain toujours enchanté, ritournelle douce et chercheuse mais gaie et sereine, montées d'adrénaline, quelques notes pompeuses, bribes de mélancolie et de grands sauts en avant dans l'inconnu.

 

J'oscille entre l'amour de l'écrit et sa détestation comme je puis aimer un homme me semble-t'il et puis m'en défaire pour ne pas être ensevelie.

 

Je descends...

 

Me voyez-vous descendre ?

 

Je glisse sans cordes de rappels ni chaînes dans des chutes vertigineuses, inconnues et volontaires comme le naufragé sans bouée de sauvetage sinon sa foi et celle des autres. Nager ! J'arriverai bien quelque-part. Je glisse dans un gouffre à écrire et n'en connais que les contours flous et mouvants, le contenant, vaste, périlleux, indéfini et la jouissance de quelques pages noirçies et de satisfactions incertaines.

 

Cela suffit-il à faire de moi une écrivaine, Qu'importe !

 

L'écriture me ramène à toi, que tu le veuilles ou non, à toi l'homme que j'ai voulu tant aimer et dont je ne savais rien , à toi aussi, l'homme qui ne dit rien, qui ne sait ni parler ni écrire, qui bâtit des murs pour ne rien sentir et se protéger de qui sinon de lui-même.


L'écriture est-elle un mur à construire ou à abattre ?

 

L'écriture me ramène à moi et à vous, mes sœurs, à vous mes filles, à nous les mères et à la femme, aux femmes qui croient savoir aimer et n'en savent pas plus.

 

L'écriture ne serait-elle qu'un cri d'amour, un cri adressé aux enfants perdus, aux femmes et aux hommes déçus ?

 

J'écris pour tenter d'apprendre quelque-chose de mon écriture et surtout pour apprendre à écrire et j'écris pour vous le faire partager.

 

J'écris pour apprendre à m'aimer et ce faisant, apprendre à vous aimer.

 

-Qu'attends-tu pour finir ton roman ?

 

-Vous m'avez fait trop attendre !

 

J'ai attendu d'aimer, d'aimer fort et sans calculs, d'aimer sans peur ni préjugés, de m'abandonner à un homme, celui que j'avais choisi. Ce fut court mais intense, court mais brillant, pareil à un concerto, léger et lumineux, simple et ouvert, l'éclosion d'un volubilis trop rouge sur une façade ensoleillée, une tempête qui ne vous effraie pas et une éclaircie terrible et sereine.

 

J'attendais de m'approcher d'une falaise au bord de l'océan en furie, de faire partie du paysage, de devenir le paysage, la falaise, l'océan et la tempête, les nuages qui s'amoncellent, le trop plein d' énérgie, le vacarme, l'éclaircie et les ribambelles de couleurs qui se déchaînent.

 

J'attendais d'être le volcan et son incendie, le torrent qui déferle en cascades tumultueuses puis s'abandonne.

 

Si mon écriture est mièvre, elle me ressemble et est la route qui m'aide à traverser les obstacles qui la parsèment.

 

La vie n'est-ce pas ça ? Une source qui se gonfle, rugit, se calme et rebondit, pleine de bruits, de couleurs et de saveurs hoquetant parfois sur les rochers, coulant entre des ronciers et des monstres griffus qui devient rivière dans les méandres de paysages diversifiés, débouche sur des clairières inattendues et va s'assoupir soudain dans des bras plus ou moins grands pour mourir dans une eau renouvelée.

 

L'écriture me ramène à toi l'homme que j'ai tant aimé et si mal à la fois. Qui peut se vanter de savoir véritablement aimer et d'aimer l'autre plus que soi ?

 

L'écriture me ramène à vous que j'aime trop et pas assez à la fois. Elle m'éloigne de tous pour mieux m'en rapprocher et n'est que la béquille qui m'évite de sombrer dans la folie, la drogue, l'alcoolisme, le pessimisme, le desespoir. Elle me ramène à l'homme que je veux aimer et non guérir, n'en ayant ni la force ni n' en aimant le sacrifice.

 

L'écriture est ma consolation personnelle, me tire de mes angoisses, de mes torpeurs. Elle est l'élan qui me manque et ma force quand je redeviens une petite fille à qui sa mère a dit d'une certaine façon, je ne t'aime pas assez pour ne pas déprimer, à qui son père a dit d'une certaine façon, je ne t'aime pas assez pour ne pas me détruire, à qui un homme inconnu a dit, je te hais assez pour te tuer.

 

Elle est la voie qui me sauve de la haine, du meurtre et de l'indifférence, celle qui abolit mes rancunes, rancoeurs ou tout désir de vengeance quand bien même elle ne vous épargnerait pas.

 

Je ne m'y épargne pas non plus.

 

L'écriture est ma thérapie oui . À vous de trouver la votre.

Tag(s) : #écriture-lecture
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