Maman, quelques mots jetés sur le papier

Maman

Tu refuses à nouveau de te nourrir

Perfusée, perds, fuse

Quand monteras-tu dans une jolie fusée

Pour aller dans ton paradis?

Nous attendras-tu?

Ouvriras-tu tes yeux et nous souriras-tu?

Les ouvriras-tu pour pleurer

Ou t'auront-ils encore abrutie de cachets?

Qu'est-ce qui est le mieux?

Que veux-tu, toi?

En cessant de te nourrir

Te rebelles-tu contre la mort

Ou la supplies-tu?

Maman

Je vais venir

Parfois

Je souhaiterais arriver trop tard

Ou je voudrais partir maintenant

Maman

Tu vas mourir

Et nous serons orphelins

De grands orphelins

Des espèces d'orques maladroits

Des papillons d'hiver en plein été

Encore une mauvaise saison à passer

Celle de la mort, des larmes, des retrouvailles et de l'absence

Nous t'avons dit que nous t'aimons, tous

Seras-tu seule pour t'immerger?

C'est ça qui m'indigne

Mourir seul

Qu'elle meurt seule
Et dans l'effroi
Je trouve cela indécent

Ignoble

Il devrait toujours y avoir quelqu'un pour tenir au moins la main de celui qui va mourir

Vous aurez la main de votre Dieu peut-être
Pas moi et ça ne m'effraie pas
S'il me la tendait avant mon dernier soupir
je la refuserai
je le sais
ça m'est arrivée avant mon opération
 
Je voudrais pourtant une main dans celle de ma mère, juste une main
Qu'importe son propriétaire



Il est très pauvre en image
Est-ce de la poésie?

Je fais toujours mourir les gens que j'aime avant qu'ils ne meurent vraiment. C'est ma façon de me préparer.