Il y a ces heures où la lassitude nous habille
D'un manteau froid
Ces soirs où il faut dessiner un jardin parfumé
Sur sa face blême
Ces matins où nous nous tirons un éclat de poésie
Dans le crâne
Ces lectures qui nous pénètrent
Comme un rayon de soleil
Il n'y a pas grand-chose parfois
Un ciel gris
Un chewing-gum à la nicotine
Un instant suspendu
Le rire blanc de Margueritte
Les mots en cascades de Marylène
Les mots rieurs de François
Les longs silences des alcooliques dans un bar
Puis leurs mots fous
Yeux envieux
Sourires moqueurs
Des luttes intérieures
Une flûte traversière
Un chat endormi
Ces heures où la paix se repose
Celles où il faut partir
Sans un son
Il y a des heures en carton
Des livres qui voudraient s'échapper
Des mots maltraités
Des mots à former
Des mots pour s'alléger
Des mots balancelle
Aux rives de dentelle
Des mots courts et souples
Il y a des mots bien plus longs
Qui refusent de se faire enfermer
La pluie qui frappe à la fenêtre
Un petit vent qui se caille
Les géraniums qui s'abandonnent
Les volubilis qui s'entêtent
La peinture qui s'écaille
Le mastic qui fuit en gondole
Une marionnette étonnée
Qui a cassé ses fils
Un clown triste qui sort du cadre
Et part ses poings fermés
Il n'y a que des enfants souriants
Accrochés en gerbe de bonheur
Des mots qui sortent du plancher
Et rampent sur les kilims et à l'assaut des murs
Des contratures
Et des massages inventés
Des fumeurs sur des balcons
Des fumistes qui brûlent des livres
Il y a tant de solitude et de misère
De jeunes sacrifiés
Toutes ces pubs qui s'entassent
Et ne servent à personne
Il y a la terre qui à midi
Tourne encore à l'envers
Une éclaircie qui lui dit
Tu sais ça ne date pas d'hier
Il y a des jours où la vie s'ébroue
Dans un souffle à peine perceptible