Impro sans relire, je me teste. Je ne suis pas très douée pour les descriptions.
Soir du 14 juin 2021.
Pas un nuage ce soir.
Aucun présage sinon celui de la chaleur.
Dans le ciel, une croix blanche et minuscule suivie de sa trainée cotonneuse filant en plein centre du premier quartier de la lune.
Un grand érable couvert de pucerons, jeunes frênes et sureaux sauvages, bouquets de noisetiers, lauriers aux feuilles émeraude, lisses et luisantes et hauts plumeaux de bambous asséchés encadrent l'espace, frémissent et le rafraîchissent.
Léger bruissement des feuillages et au loin, par dessus les murs usés, écroulés en partie, recouverts de lierre et de vigne-vierge, des étourneaux aux cris stridents se disputent la place sur un vieux conifère mort, et s'alignent sur les branches, telles des notes désaccordées.
Les petites fleurs roses et blanches du trèfle, celles des pâquerettes, timides et vivaces, parsèment l'ancienne pelouse.
Au bout du jardin, un tout petit potager mêle ses essences de persil, de ciboulette, thym, basilic et de menthe poivrée à celle naissante d'un gros pied de lavande. Il est cerné par un laurier rose foisonnant et quelques pieds de dahlias, de fougères et de mélisse.
Dans l' un des angles du fond, la joubarbe et une sauge fleurie entretiennent de bonnes relations. Quelques pieds de tomates, précautionneusement paillées, fins et élancés, aux petites fleurs jaunes en forme d'étoile , entourent de vieux piquets de bois, convoités par les abeilles charpentières sur la défensive. Des œillets d'inde brillent encore de leurs pompons orangés. Dans l'alignement, quelques radis rescapés sortent entre des fanes de carottes oubliées.
Sur deux côtés, face à l'ouest, bien alignés, les boutons jaunes et pâles des courgettes jaillissent d'une couronne de feuillage vert tendre, revigorée par un arrosage minutieux.
Quelques boutures de noisetiers, giroflées en graines et tournesols aux fleurs vertes, primevères sous le pied de lavande ou abritées du soleil derrière de grosses pierres de granit dressées -petits menhirs pailletés d'éclats de verre, de suie et d'argent - coquelicots têtus aux fleurs évasées d'un rouge écarlate, bien décidés à s’implanter, donnent à l'ensemble un sentiment de joyeuse fantaisie.
Rehaussant le terrain et coupant l'espace pour en offrir de plus intimes, un grand romarin frime face à un arbre à faisans fragile, aux clochettes roses et graciles.
Dans les 4 longues plates-bandes étroites du pourtour du terrain, méticuleusement désherbées, des pourpiers roses et jaunes, des bouquets frivoles et aériens de hautes marguerites maintenues par des ficelles , des hortensias roses, des dahlias rouges et blancs , des violettes, des feuilles de muguet, des tiges tombantes et jaunies du muscari auquel s'accrochent encore des grelots ocre et arrondis prêts à s'en détacher, des menthes épaisses et grasses, des kanas, des rosiers nains alanguis par la chaleur mais téméraires, carmin ou blanc, des fraisiers des bois et leurs petites fraises attendrissantes, des framboisiers, un chêne au soir de sa naissance, quelques grands chardons bleus, une orchidée sauvage et frêle, des fuchsias, d'autres coquelicots, d'autres pieds d'aromate, de grands lupins aux grappes mauves, un jeune lilas en conquête, des fleurs sauvages s'épanouissent dans un chaos ordonné.
La terrasse, à l'ouest, seul espace plat à l'ombre de l'érable au tronc écorcé, est elle, encadrée d'un jeune hibiscus protégé du soleil par une cagette, et d'un citronnier en pot, dernier arrivant.
Ci et là, tout autour, tas de pierres, tas de bois, tas de feuille, compost en fosses, ou briques percées à insectes.
Côté habitation, au nord, des îlots de fougères ou de marguerites masquent le bas des fenêtres du rez de chaussée, bien séparés par un vieil escalier de pierres aux marches creusées. Sur les côtés, vigne vierge et vigne à raisin se sont lancées à l'assaut des angles des murs. A leurs pieds, les choux de la joubarbe jouent au milieu des œillets de poètes et des nigelles de Damas. L'escalier voisine avec un poteau de bois épais et incliné, abandonné par d'anciens voisins qui l' y avaient planté pour y accrocher leur hamac ou une corde à linge à l'aide du tronc de l'érable. Un jasmin aux fleurs blanches et délicates s'y élève à l'aide d'arceaux et de tuteurs de bambou.
Profusion de parfums, d'espèces et de couleurs, de taille et de hauteur, de matière. Fleurs classiques et sauvages se côtoient dans un joyeux mélange. Couleurs contrastées et relevées au coucher du soleil, condamnées à ternir avec l'arrivé brute du crépuscule.
Mélisse et menthe poivrée montent soudain aux narines. Seul le quartier de la lune étincelle.
Quelques pollinisateurs tardifs butinent encore. Dans la corolle d'un coquelicot, un gros bourdon. Un autre traverse le terrain à vive allure en bourdonnant. Un hanneton chute dans l'herbe, se retourne et s'envole en zigzags hasardeux et lourdauds. Une longue trainée de nuages orange s'élève au dessus des murs et souligne l'horizon. Les étourneaux se sont tus, d'un seul coup. Dans un jardin voisin, le même merle chante sa mélodie gracieuse du haut d'un bouleau sans feuilles et un autre lui répond. Deux pigeons roucoulent encore et cherchent les abreuvoirs. Le parfum de la lavande devient entêtant.
Plus rien ne bouge. La bise légère a cessé. L'air se rafraîchit peu à peu. Le crépuscule fond couleurs et matière et le ciel s'est grisé. Hormis l'aboiement agressif d'un chien, les bruits étouffés de la ville augmentent d’intensité. Moteurs de voiture, klaxons, échos de voix . Ballets des martinets criards fendant l'air, inlassables et rapides. On dirait des pointes de flèches à ailettes mobiles.
La bande de nuages a rosi, s'est élevé et fragmenté et a pris des allures de vaisseaux fantomatiques se suivant en ligne obéissante et naviguant sur une mer sans vagues. L'obscurité a saisi le jardin, étendant sur lui sa couverture uniforme . Le ciel est tout gris et bas. Un avion se dirige vers le croissant bien net de la lune, petit point et panache rose fluo. Tiens ! Après s'être tu, les étourneaux se sont enfuis. La fraîcheur véritable et attendue arrive enfin. C'est bientôt l'heure des hérissons.
Etc.
Si je devais faire publier ce texte, oui, je le ré-écrirai. Essayer de trouver un rythme, des mots plus subtils, pas forcément plus compliqués, des expressions plus légères, un ordre plus logique. Relire et entendre s'écouler de manière harmonieuse ou pas. Après, ce n'est pas ça que j'écris en ce moment. Ce n'est donc pas de la grande littérature, ce qui ne m'empêchera pas d'écrire. En écrivant, on prend toujours les mots des autres. A moi d'y ajouter un rythme, une atmosphère, un intérêt pour le lecteur.
à suivre pour la saisie
(je vais arroser ! au pied et au demi-arrosoir, par conscience et par manque de force. Force physique et force mentale ne sont pas forcément associées. Vous comprendrez ça en perdant de vos forces physiques).
Intermèdes :
Les plantes m'ont dit : "Trop d'eau nous nuisent" et j'ai appris à les écouter. Récemment, on m'avait offert un tout petit cactus émouvant dans son tout petit pot et , le croyant assoiffé, je l'ai trop abreuvé. Il m'en a voulu et tous mes efforts pour le ranimer furent vains. je l'ai fait sécher, l'ai rempoté, lui ai ajouté du sable, l'ai étayé quand sa petite tête pendait de façon tout-à-fait pitoyable, l'ai changé de place, ai caressé ses épines minuscules et presque inoffensives, lui ai conté des histoires, lui ai passé mes chansons préférées, l'ai renversé 3 fois, lui ai fait tomber le manche à balai que j'utilise pour caler l'entrebâillement des fenêtres dessus, l'ai piétiné au moins 2 fois par mégarde et comme il pourrissait de l'intérieur sans aucune gratitude, tel un silo qui implose mais plus lentement, je l'ai envoyé par la fenêtre afin que ses restes insipides nourrissent les bêtes, et ce, sans remords aucun, sinon une petite peine pour qui me l'avait offert. . . Un autre petit cactus dans son autre petit pot que j'ai laissé tranquille, offert par la même personne, me gratifie tous les jours des ses fleurs rouge vif tendues vers la clarté. De la vie et la mort de ces deux cactus, j'en ai tiré quelques conclusions sur les couples d'humains.
En formation, je me souviens de ces mots : "vous faites partie de ceux qui savent s'évaluer avec précision", autrement dit, je me connais bien. Je me souviens aussi d'un graphique suite à une évaluation dont le but était de mieux définir nos connaissances et compétences et les domaines d'activité qui nous correspondaient le plus. Je me trouvais en plein centre et j'en ai eu des éloges. J'en ai fait une lecture différente. Au plein centre de tout, c'est aussi être au plein centre de rien, non pas que j'espérais devenir le centre de quelque-chose, au sens ou si j'avais des possibilités en bien des domaines, littéraire, scientifique, mathématique, etc, je n en avais développé aucune plus que d'autres. Au plein centre et donc spécialiste de rien, comme "médiocre".
Je me suis fait une raison, me suis sentie comme des milliards d'individus, qui ne brillaient pas et n'avaient pas non plus chercher à briller et j'en ai conclu que le plus important restait la ténacité et la foi en l'amour et en la vie, et qu'être en plein centre, c'était aussi être curieuse de tout, être tenace, s’intéresser au monde et aux autres et être capable. J'ai connu aussi des spécialistes qui n'y connaissaient rien en dehors de leur spécialité. Elle leur prenait tout leur temps et ils n'avaient pas le temps de réfléchir au sort du monde, à son avenir et à celui de la planète, ou des militants, uniquement centrés sur leurs propres sorts et leurs propres combats et toujours très critiques envers ceux des autres . J'ai pensé que j'avais fait des choses bien, comme tout un chacun, que j'avais su aimé, encouragé, enfanté, assisté, émouvoir, fait rire, fait lire, éduqué des enfants au respect de la faune et de la flore et des autres, et qu'au final, je ne regrette aucun des hommes que j'ai aimés, quand-bien même ça s'est parfois mal terminé ou avec des difficultés, des peines et des souffrances.
Pour en venir à l'écriture, ça reste un domaine ou j'ai beau avoir eu beaucoup lu et lire toujours, m'évaluer m'est impossible. J'écoute maintenant uniquement ceux qui m'ont encouragée et pas les autres, trop nombreux, qui souvent n'écrivaient pas eux-même, ou écrivaient autre chose. Quand à mes ambitions, elles restent modestes.
Je m'éclaire à la bougie et pense que j'aurais du le faire depuis longtemps. Seuls le réfrigérateur, le modem et l'ordinateur consomment. Que d' électricité gaspillée quand j'y songe ! La pauvreté engendre aussi des gestes et des actes de sauvegarde, pas seulement de soi-même. Elle trie et classe les priorités et se fiche du paraître.